TVA et particuliers : quels enjeux pour les immeubles de rendement ?

En Suisse, les particuliers louant des biens immobiliers sont généralement exemptés de la TVA. Toutefois, au-delà de CHF 100'000 de chiffre d’affaires, l’enregistrement devient obligatoire et des règles spécifiques s’appliquent.

En Suisse, la location d’immeubles ou de parts d’immeubles est en principe exclue du champ d’application de la TVA et ne donne donc aucun droit à la déduction de l’impôt préalable. Cette règle s’applique aussi bien aux surfaces d’habitation qu’aux locaux commerciaux. 

Ainsi, un particulier qui loue un ou plusieurs biens immobiliers n’est généralement pas tenu de s’assujettir à la TVA, quel que soit le montant de ses revenus locatifs, tant que son activité demeure limitée à des opérations exclues. Il existe toutefois certaines exceptions, et même quelques pièges. 

Voici un tour d’horizon des principales situations en matière de TVA immobilière pour les particuliers, illustré par quelques cas pratiques. 

L’option pour l’imposition volontaire 

Bien que l’immobilier soit généralement exclu du champ d’application de la TVA, un propriétaire peut choisir l’assujettissement volontaire pour ses locations à usage commercial. Cette option peut s’avérer financièrement avantageuse lorsqu’un bien nécessite des investissements, rénovations ou travaux d’entretien importants, puisque la TVA sur ces dépenses devient alors déductible, sous réserve du respect des conditions légales. 

En pratique, la TVA facturée sur les loyers commerciaux ne constitue généralement pas un coût supplémentaire pour les locataires, dans la mesure où ils sont eux-mêmes assujettis et peuvent la récupérer dans leur propre décompte. Ainsi, l’option permet au bailleur de déduire l’impôt préalable, tout en préservant la neutralité fiscale pour le locataire. 

À l’inverse, cette option ne s’applique pas aux surfaces d’habitation, qui demeurent exclues du champ de la TVA. 

Exceptions particulières 

Certaines locations sont expressément imposables, indépendamment de toute option : 

  • Locations de vacances : soumises au taux spécial de 3,8 % (taux en vigueur en 2025), qu’elles soient proposées directement par le propriétaire ou via des plateformes (Airbnb, etc.). 
  • Places de parc : soumises au taux normal de 8,1 % (taux en vigueur en 2025) lorsqu’elles sont louées séparément d’un bail principal. 
  • Revenus publicitaires : l’utilisation de surfaces à des fins d’affichage ou pour d’autres supports analogues est imposable, sauf lorsqu’elle est accessoire à une location principale exclue du champ de la TVA. 

Propriétaires privés d’appartements de vacances 

Dans cette partie, nous mettons l’accent sur les particuliers qui détiennent des biens de rendement à titre privé et nous présentons des situations fréquentes tirées de la pratique : 
 

Variante A
Situation 
  • Un salarié possède à titre privé des appartements de vacances en Suisse, générant env. CHF 50'000 de recettes annuelles. 
  • Lui ou sa famille utilisent l’un des appartements lorsqu’il n’est pas loué.
Chiffre d’affaires déterminant (CA)
  • Env. CHF 50'000 (recettes) + usage privé à valoriser
TVA – Analyse
  • Dès CHF 40'000 de recettes (TVA incluse), l’AFC considère l’activité comme entrepreneuriale. 
  • L’assujettissement n’est toutefois obligatoire qu’à partir de CHF 100'000 de chiffre d’affaires. 
  • L’utilisation privée doit être valorisée à sa juste valeur locative et déterminée chaque année afin de vérifier le seuil.
Conséquence pratiques
  • Contrôle du seuil de chiffre d’affaires chaque année.  
  • Usage privé doit être valorisé chaque année → suivi administratif complexe. 
Variante B
Situation 
  • Un salarié possède à titre privé des appartements de vacances en Suisse, générant env. CHF 85'000 de recettes annuelles. 
  • Lui ou sa famille utilisent l’un des appartements lorsqu’il n’est pas loué → La valeur de l’utilisation privée s’élève à CHF 20'000.
Chiffre d’affaires déterminant (CA)
  • CHF 105'000 (recettes + usage privé)
TVA – Analyse
  • Seuil de CHF 100'000 dépassé → obligation d’assujettissement TVA 
  • La TVA est due sur toutes les prestations d’hébergement, y compris l’usage privé. 
  • En principe, le propriétaire doit tenir une comptabilité commerciale intégrant produits et charges liés à cette activité. 
  • Il peut déduire l’impôt préalable afférent, sous réserve d’apporter les preuves nécessaires. 
Conséquence pratiques
  • Obligation d’assujettissement TVA.  
  • TVA due sur les recettes + usage privé.  
  • Comptabilité à tenir.  
  • Impôt préalable déductible (preuves nécessaires).
Variante C
Situation 
  • Un indépendant exploite une boutique (CHF 60'000 de recettes). 
  • Il possède – dans sa fortune privée – des appartements de vacances générant CHF 50'000 de loyers, également utilisés ponctuellement à titre privé. 
  • Il n’est pas inscrit à la TVA.
Chiffre d’affaires déterminant (CA)
  • Env. CHF 110'000 (CHF 60'000 + 50'000 + usage privé)
TVA – Analyse
  • Les locations dépassant CHF 40'000 sont considérées comme activité entrepreneuriale. 
  • Les locations étant considérées comme entrepreneuriales, elles doivent être intégrées à l’activité indépendante.  
  • Les revenus locatifs s’ajoutent à l’activité indépendante → seuil TVA dépassé 

CA déterminant inclut : 

  • CHF 60'000 (boutique) 
  • CHF 50'000 (locations) 
  • la valorisation de l’usage privé. 
  • Le seuil de CHF 100'000 est dépassé : obligation de s’assujettir à la TVA. 
  • L’impôt préalable est en principe déductible avec preuves à l’appui.
Conséquence pratiques
  • Obligation d’assujettissement TVA.  
  • TVA due sur l’intégralité des CA (selon les taux applicables) 
  • Impôt préalable déductible (preuves nécessaires). 
  • Nécessité de comptabiliser l’ensemble  
Variante D
Situation 
  • Un indépendant déjà assujetti à la TVA pour son activité de conseil (CHF 350'000 de chiffre d’affaires). 
  • Il détient à titre privé des appartements de vacances générant CHF 40'500 de loyers, non comptabilisés dans son entreprise.
Chiffre d’affaires déterminant (CA)
  • CHF 390'500
TVA – Analyse
  • Les locations étant considérées comme entrepreneuriales, elles doivent être intégrées à l’activité indépendante. Les revenus locatifs s’ajoutent à l’activité indépendante. 
  • Les loyers sont soumis au taux spécial de l’hébergement. 
  • L’impôt préalable afférent est déductible, sous réserve de preuves.
Conséquence pratiques
  • TVA due sur loyers.  
  • Déduction de l’impôt préalable possible (sous conditions) 
  • Nécessité de comptabiliser l’ensemble

À retenir

  • Dès 40'000 CHF de loyers bruts, l’AFC considère qu’il y a une activité entrepreneuriale. 
  • Dès 100'000 CHF de chiffre d’affaires, l’assujettissement devient obligatoire. 
  • L’assujettissement permet de déduire la TVA sur les dépenses liées à l’activité, respectivement de récupérer l’impôt préalable sur les investissements, sous réserve de preuves suffisantes. 

Conclusion 

TVA et immobilier forment un duo souvent sous-estimé. Certains particuliers, en louant leurs biens de rendement, peuvent être soumis à la TVA sans l’avoir anticipé. Une analyse préalable est essentielle, non seulement pour éviter des risques fiscaux, mais aussi pour identifier des opportunités d’optimisation grâce au droit à la déduction de l’impôt préalable.

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