Et si l’avenir de la fiscalité passait par le système d’information ?
A l’ère de l’automatisation et du big data, la digitalisation des fonctions fiscales est plus que jamais d’actualité. Les directions financières considèrent que la fiscalité est une fonction ayant un potentiel de digitalisation à l’avenir. Cette matière, qui s’appuie sur des notions comptables mais également juridiques reste, encore aujourd’hui, insuffisamment appréhendée par les systèmes d’information. Le champ des possibles est en effet beaucoup plus vaste que le simple établissement des déclarations fiscales et que les seuls contrôles basés sur la comptabilité. L’automatisation de nombreux autres contrôles, à partir des documents générés par l’ERP, enregistrés dans un module annexe ou des données publiques, peut être envisagée. Toutefois, pour être efficients et pertinents, ces contrôles doivent répondre aux besoins réels des fonctions financières et fiscales et s’appuyer sur une technologie fiable dans un environnement IT intégré et simple d’utilisation. Mais cet objectif est-il réalisable ?
La fonction fiscale, entre cadre normatif exigeant et réalité du terrain
Cadre normatif et systèmes d’information
Depuis quelques années, l’environnement fiscal des entreprises est caractérisé par un renforcement des obligations déclaratives, au-delà des déclarations visant à asseoir l’impôt. Ces obligations permettent aux administrations fiscales d’obtenir de nombreuses informations sur l’activité et les flux ayant un impact fiscal, mais aussi de simplifier les opérations de contrôle, notamment dans un contexte international.
Ainsi, depuis 2013, les entreprises françaises doivent établir un fichier des écritures comptables reprenant l’ensemble des écritures de l’exercice selon un format préétabli et une documentation de leur piste d’audit fiable en matière de TVA.
Si l’établissement d’un fichier des écritures comptables est à ce jour maîtrisé par la majorité des logiciels et des entreprises, les contrôles liés à la piste d’audit fiable en matière de TVA sont encore largement sous-automatisés, notamment lorsque le système est morcelé ou lorsqu’ils nécessitent de s’appuyer sur des informations ou documents non générés par l’ERP.
Dans un contexte international, le respect des obligations liées aux prix de transfert (documentation et déclarations annuelles) et le contrôle de la conformité des prix pratiqués aux méthodes établies dans la documentation peuvent s’appuyer sur les données contenues dans l’ERP, et d’autant plus lorsque celui-ci est partagé par toutes les sociétés d’un même groupe au niveau international.
Outre ces obligations déclaratives, de nouvelles évolutions sont à anticiper, et notamment :
- la facturation électronique obligatoire entre entreprises, qui conduira à faire évoluer les logiciels de facturation et de contrôle, en lien avec la piste d’audit fiable TVA,
- la mise en place en France d’un véritable Groupe TVA, déjà existant dans d’autres Etats membres de l’Union européenne, laquelle supposera une transmission accrue et automatisée des informations vers la société tête du Groupe TVA.
Toutefois, dans ce cadre normatif précis, l’évolution des systèmes d’information doit en premier lieu répondre aux besoins réels des fonctions fiscales en entreprise.
Efficience opérationnelle des processus fiscaux : de la nécessité de mettre en place des outils embarqués et interconnectés
Opérant dans ce cadre de plus en plus contraignant, les entreprises s’organisent afin de mettre en place des processus fiscaux spécifiques. Ces derniers doivent permettre de sécuriser les obligations déclaratives tout en maitrisant la charge de travail incombant aux équipes fiscales et comptables.
Les directions financières veulent ainsi réduire le temps dédié aux tâches répétitives telles que l’extraction de données, le lettrage des comptes ou encore les travaux de pré-cadrage. Dans cette optique, elles sont à la recherche d’outils et de bonnes pratiques à mettre en place pour limiter le nombre d’interventions manuelles des données et le nombre de fichiers de travail. C’est notamment le cas pour la TVA dont la déclaration mensuelle peut se révéler parfois très chronophage ou bien insuffisamment sécurisée en l’absence d’un processus et d’outils spécifiques.
Le temps libéré peut alors être consacré à la réalisation de contrôles de second niveau visant à vérifier la correcte application des normes et leur bonne traduction dans les outils. Les équipes comptables et fiscales peuvent dès lors se concentrer davantage sur les actions de remédiation dans l’objectif de délivrer à l’administration fiscale des déclarations fiables, sécurisées et documentées des impôts et taxes.
Enfin, ces processus intègrent forcément la production de la documentation exigée par l’administration fiscale, au quotidien (exemple : justificatif de demande de remboursement de crédit de TVA) ou bien lors de ses contrôles périodiques. Les entreprises doivent ainsi prévoir la justification de la piste d’audit fiable pour la TVA, des taux de marge en matière de prix de transfert ou l’édition du fichier des écritures comptables.
Le SI en appui à la fonction fiscale, exigence d’un outil de tax compliance
Face à ces obligations multiples nécessitant de nombreux contributeurs, les directions financières et fiscales souhaitent rationaliser les outils déclaratifs afin de créer a minima davantage d’interconnexions entre les sources de données. Leur idéal étant un outil centralisé permettant d’intégrer les processus fiscaux de bout en bout à partir de ces différentes sources. En outre, compte tenu des évolutions réglementaires à venir s’appuyant davantage sur les systèmes d’informations, ce sujet doit d’ores et déjà être anticipé par les entreprises.
Dans ces conditions, comment choisir la meilleure solution parmi toutes les offres sur le marché ? Comment piloter un projet de tax compliance ? Et quelles sont les différentes phases d’un projet d’organisation ou rationalisation de la gestion de la fiscalité ?
Le marché français et mondial se dote aujourd'hui de nombreux outils de tax compliance permettant aux entreprises d'améliorer la gestion des risques en cas de contrôles fiscaux. La digitalisation de la TVA et de la Sales and Use Tax aux Etats-Unis accroît également le besoin de se doter d'une solution fiable de conformité fiscale.
Parmi ces nombreuses solutions, certaines offrent des fonctionnalités basiques et s’adressent plutôt aux petites structures soucieuses de faciliter leurs processus, tandis que d’autres, beaucoup plus complètes, offrent une couverture fonctionnelle plus large permettant aux grands groupes d’outiller à la fois les départements comptables et compliance.
A ce jour, 6 éditeurs proposent des solutions dédiées :
Ces solutions s’articulent autour de 2 grands types de fonctionnalités :
- L’aide à la conformité des déclarations (a priori) :
- l’optimisation de l'élaboration de la liasse fiscale (élaboration, vérification et dématérialisation),
- la détermination de taux,
- la conformité de la facturation électronique,
- La déclaration de TVA (soumission, reporting et contrôles).
- La mise en place de contrôles afin de s’assurer de la conformité (a posteriori) :
- l’analyse du FEC,
- les contrôles sur les référentiels (fournisseurs, articles, etc.),
- les contrôles sur les transactions effectuées.
Dans certains cas, la solution peut aussi tenir compte des interactions entre les normes des différents Etats et intégrer leurs spécificités locales. Cela permet d’éviter d’avoir à démultiplier le nombre de solutions spécifiques à chaque réglementation, ce qui engendrerait naturellement des coûts de mise en conformité significatifs. Cette solution doit aussi faire partie intégrante de l’écosystème de logiciels financiers.
Sur quels critères choisir sa solution de tax compliance ?
Le choix d'une solution doit être fondée sur les critères tant fonctionnels que techniques, pour répondre aux besoins suivants :
- Facilité d’installation de la solution : évaluer le degré d’autonomie sur l’installation et le paramétrage du logiciel, ainsi que le degré d'intégration dans le paysage SI existant.
- Réponse aux besoins métier au travers de la couverture et richesse fonctionnelle : il est nécessaire d’évaluer la couverture d’un maximum de fonctionnalités et de contrôles standards, ainsi que la couverture géographique au travers d’une gestion multi-pays. Assurance de la facilité de prise en main par l’utilisateur final ou l’auditeur externe au travers d’une ergonomie conviviale et intuitive
- Exploitation des résultats simple et accessible : évaluer la facilité de compréhension et d’interprétation des résultats de contrôles, la facilité d’export sur des outils bureautiques, ainsi que la capacité de génération des rapports d'anomalie sous format.doc ou .pdf avec explication des résultats, annotations utilisateurs, etc.,
3 facteurs clés de succès pour bien piloter son projet de tax compliance
Afin de mener à bien un tel projet, il convient de l’appréhender et de fédérer tous les métiers concernés. La mise en place d'une solution de tax compliance est avant tout un projet global impliquant plusieurs acteurs, unis par la volonté commune de changement au sein de l’entreprise.
Les facteurs clés de succès sont les suivants :
- Une équipe pluridisciplinaire innovante. Pour que l'expression des besoins soit la plus exhaustive et le résultat le plus efficace, il convient en premier lieu de définir les fonctions impactées par la solution donc d'établir un groupe de travail composé de compétences pluridisciplinaires : finances, juridiques, fiscales, comptables et IT.
- Une animation transverse de l'équipe. Il est nécessaire de chapeauter cette équipe. Pour cela, il conviendra d’identifier un sponsor donnant les moyens nécessaires à la réussite du projet et un chef de projet ayant la capacité de faire le lien entre les différentes disciplines et pouvant parler le même langage.
- Une stratégie de projet globale et partagée. La décision d'intégrer ce type d'outil s'inscrit dans le choix d’entreprise de posséder un core model fiscal (un modèle unique fiscal), au même titre qu’un core model comptable, qui satisfait les métiers et l'IT. Il est indispensable de prendre en compte les besoins, attentes et contraintes souvent difficilement conciliables de chaque partie.
Préparer sa démarche pour réussir son déploiement
Les solutions du marché proposent des contrôles standard. Un projet de mise en œuvre d’un outil de tax compliance demande de suivre une démarche sur 4 axes pour assurer la réussite du projet.
Comprendre. Se poser les bonnes questions sur le périmètre (les taxes à couvrir, les métiers impactés, les pays à couvrir, etc.), est un prérequis important pour pouvoir dresser un état des lieux des traitements existants. Il s’agit entre autre de mettre en place une cartographie des risques et de lister les contrôles afférents.
Préparer. Pour s’assurer de l’exhaustivité des contrôles à mettre en œuvre, il est nécessaire d’analyser les écarts par rapport aux contrôles standard fournis par la solution cible, d’identifier les données nécessaires pour effectuer les contrôles, et enfin d’adapter les contrôles existants au contexte de l’entreprise ou de paramétrer de nouveaux contrôles.
Analyser. La phase d’analyse est la phase d’exécution des tests, d’interprétation et de justification les résultats.
Restituer. Une fois l’analyse faite, il est important d’émettre un compte rendu compréhensible à destination des principales parties prenantes, et surtout de mettre en place des actions correctives en cas d’anomalies identifiées.
En synthèse, l’automatisation des contrôles et de la fonction fiscale va devenir, dans cet avenir mouvant, incontournable. Toutefois, pour être efficients et pertinents, ces contrôles et les solutions par lesquelles ils seront mis en œuvre, ne peuvent être développés que par des équipes d’experts dont les compétences sont complémentaires (finances, IT, fiscalité, comptabilité) et alimentées par une expérience de terrain.